Aujourd’hui visite à Hébron car la cueillette n’a pas été possible.
Il y a deux ou trois ans a été créé un bureau de coordination israélo-autorité palestinienne (DCO) pour négocier l’accès des Palestiniens aux terres proches des colonies. Ce bureau en réalité est un leurre : il crée un intermédiaire supplémentaire et ne facilite pas les autorisations d’accès. De plus l’autorité palestinienne s’est fait avoir parce qu’il y a deux ans le mur n’était pas si long, donc les cueillettes d’olives se faisaient moins difficilement (avocats, palabres avec l’armée et le colon en direct). Maintenant, il y a un mur très long. Il faut passer de l’autre côté et les autorisations sont lentes à venir. Vendredi, pas d’autorisation à cause de l’incident de mercredi avec le gros colon.
Samedi, aujourd’hui, à dix heures, les israéliens ne répondaient pas au téléphone. c’est le shabbath alors que le bureau était censé être ouvert.
Alors nous sommes allés à Hébron pour observer, prendre des photos de l’horreur. Berlin avant la chute du mur, c’était une blague. Il y a des rues coupées en plein milieu par des barbelés, blocs de béton, et à cause des jets de pierres, des grillages de plusieurs étages. Pourquoi ? Eh bien parce qu’il y a à l’intérieur même de la ville des îlots de maisons de colons qu’ils relient avec des passerelles. Ils grignotent le terrain. Gare routière : disparue. Grand marché central : disparu dans les barbelés, les maisons explosées, les ordures que les colons jettent de leurs fenêtres.
Oui, il y a des boutiques au rez de chaussée et des constructions israéliennes par dessus (les colons rentrent chez eux par une rue derrière), alors les palestiniens ont tendu des grillages au dessus de leur tête, et ça fait comme une couverture de rue, un peu comme le souk de Marrakech mais c’est pour se protéger des pavetons et des ordures et non pas du soleil. C’est répugnant. Il faut passer dans un tourniquet genre aéroport pour aller visiter la mosquée et le tombeau d’Abraham, sans compter le poste de militaires armés jusqu’aux dents avec un autre tourniquet et poste de fouilles. Nous avons tenu bon. R. a été fouillé, pas nous (la ceinture, les godasses,etc.)
Les palestiniens sont coincés et maintenant, qu’on ne vienne plus me dire qu’avec le mur, ça sera plus calme. C’est l’horreur, c’est immonde. Je ne sais comment raconter. Alors nous avons pris des photos. Les Palestiniens sont incroyables. Dans le secteur H1, contrôlé par l’autorité palestinienne, ça grouille de monde (n’oublions pas qu’il y a au moins 100 000 habitants à Hébron et 400 israéliens qui les font chier, qui transforment leur ville en un trou à rats), un monde coloré et vivant. Dans le secteur H2, contrôlé par les Israeliens depuis quelques années, depuis l’attentat commis par un colon fasciste de Kyriat Arba dans la mosquée, c’est indescriptible, j’en ai l’estomac retourné.
Un commerçant a voulu témoigner : sa boutique est vide. Il ne vend plus rien mais continue à ouvrir sa boutique comme un acte de résistance. Nous l’avons écouté, il nous a demandé de témoigner.
Ensuite nous sommes allés voir l’avocat du Comite de Défense de la Terre. Son bureau se trouve dans un immeuble ou les locaux ne sont pas chers, parce qu’il est en ligne de mire du camp militaire, juste sur la colline en face. L’étage en dessous est démoli et des trous de balles partout. Photos prises aussi. Je comprends l’expression : parler a un mur
Chantal